La gestion des ressources en eau et d’assainissement en Afrique est de plus en plus menacée par les effets du changement climatique, aggravant les défis d’accès à l’eau potable et à l’assainissement. À l’occasion d’un webinaire organisé par le Réseau Africain des Médias pour le WASH (RAM-WASH) et l’Association Africaine de l’Eau et de l’Assainissement (AAEA), des experts ont partagé leurs analyses sur les risques climatiques et les stratégies à mettre en place pour assurer un accès équitable et durable à ces ressources vitales.
Un secteur en quête de solutions durables
François Olivier Gosso, Directeur exécutif de l’AAEA, a souligné l’importance d’une gestion efficace et concertée des services d’eau et d’assainissement sur le continent :
« L’AAEA regroupe plus de 100 membres, allant des opérateurs aux régulateurs, en passant par les institutions de recherche. Notre mission est de promouvoir la coopération et l’échange de bonnes pratiques pour renforcer les capacités des acteurs du secteur en Afrique. »
Il a rappelé que l’Afrique, bien qu’exempte de glaciers, subit directement les conséquences du réchauffement climatique, notamment la baisse des précipitations, les sécheresses prolongées et l’élévation du niveau des mers.
« La fonte des glaciers modifie le cycle hydrologique mondial et affecte la disponibilité de l’eau douce en Afrique, impactant nos nappes phréatiques et notre capacité à garantir une eau potable de qualité », a-t-il expliqué.
Selon lui, il est crucial d’investir dans des infrastructures résilientes :
« Il faut développer des réseaux d’assainissement adaptés aux inondations, renforcer les capacités de stockage et de captage des eaux pluviales et encourager la construction d’usines de dessalement et de stations de traitement avancées. »
Des initiatives concrètes pour l’accès à l’eau
Daouda Sanon, coordonnateur de l’ONG ACRA et membre fondateur de la POSCEAS, a mis en avant des projets innovants comme l’initiative « Un toit, Un Robinet », déployée en Casamance depuis 2006.
« Nous avons mis en place des solutions locales durables, telles que l’alimentation des réseaux d’eau par des centrales solaires, ce qui permet d’économiser sur le gazole et de réduire les émissions de CO2. »
Les résultats sont encourageants : les économies réalisées ont permis de financer d’autres projets environnementaux, prouvant que l’accès à l’eau peut être combiné avec des stratégies écologiques et économiques viables.
Les populations urbaines en première ligne face aux crises hydriques
Lucien Damiba, expert en gestion de l’eau et du climat chez WaterAid Burkina Faso, a alerté sur la vulnérabilité accrue des populations urbaines :
« 90 % des catastrophes climatiques mondiales sont liées à des problématiques d’eau. Les villes africaines comme Khartoum, Addis-Abeba ou Lagos sont déjà fortement impactées par des sécheresses et des inondations extrêmes, compromettant l’accès à l’eau potable. »
Il a insisté sur l’urgence pour les gouvernements et les institutions internationales de prendre en compte l’eau et l’assainissement dans leurs politiques d’adaptation climatique :
« Il est essentiel d’intégrer ces enjeux dans les plans d’action nationaux et municipaux, en mettant un accent particulier sur les populations vulnérables, notamment les femmes, les enfants et les personnes en situation de handicap. »
Un plaidoyer fort pour une action collective
Les experts s’accordent à dire que l’Afrique doit fournir un accès à l’eau potable à 500 millions de personnes supplémentaires d’ici 2030. Pour y parvenir, coopération, innovation et renforcement des capacités sont des impératifs.
Moussa Thiam, Président du RAM-WASH, a rappelé le rôle clé des médias dans cette bataille :
« L’eau est un bien commun inestimable, mais l’injustice hydrique persiste. Les médias doivent sensibiliser, interpeller et influencer les politiques publiques pour garantir un accès équitable à l’eau et à l’assainissement. »
Le webinaire a également ouvert des perspectives de collaborations entre les médias, l’AAEA, WaterAid et d’autres acteurs majeurs du secteur, soulignant la nécessité d’un plaidoyer structuré et efficace.
Si cette rencontre représente une avancée, elle rappelle surtout que le combat pour l’accès universel à l’eau et à l’assainissement doit se poursuivre avec détermination. Comme l’a conclu Moussa Thiam :
« Ensemble, nous devons analyser les défis, partager des initiatives inspirantes et identifier des solutions durables pour garantir un accès à l’eau pour tous. »